L'ONU pour les petits et les grands
Et pour que les grands écrasent les petits
Monsieur Joseph Deiss, chargé de diriger la politique étrangère de la Confédération, espère remettre bientôt cette lourde responsabilité entre les mains des chefs de l'ONU. Notre ministre se fait en effet une haute idée de cette organisation où chaque membre est respecté et écouté et où un droit international bienveillant protège les plus faibles contre la loi du plus fort. Les îles Vanuatu y côtoient les Etats-Unis d'Amérique, le lion gît avec l'agneau et de belles dorures brillent autour de ce tableau admirable.
Admirable, c'est le mot: pendant que le secrétaire général de l'ONU Kofi Annan reçoit le prix Nobel de la Paix, les Américains, qui se fichent éperdument des mandats de l'ONU, bombardent frénétiquement quelques tertres en Afghanistan, les Israéliens, qui se fichent éperdument des résolutions de l'ONU, pilonnent frénétiquement des villages palestiniens, et les Indiens et les Pakistanais, qui se fichent éperdument de la Charte de l'ONU, menacent de se livrer une guerre nucléaire. Pour compléter ce tableau, Mme Ewa Kedzierska, journaliste invitée dans les colonnes de 24 heures du 31 octobre dernier, nous raconte comment les Chinois, qui eux aussi se fichent éperdument de l'ONU, usent de leur puissance pour y interdire d'accès le Dalaï-Lama: le chef religieux, lui aussi Prix Nobel de la Paix, est soigneusement tenu à l'écart de toutes les réunions religieuses et ses photos ont été méthodiquement bannies du Palais des Nations Unies. Son nom n'existe pas, pas plus que celui du Tibet. Et il n'y a pas de violation des droits de l'homme en Chine...
M. Deiss se réjouit donc que la Suisse rejoigne ce club sympathique où elle pourra «faire entendre sa voix» en se faisant mener par le bout du nez par les Etats-Unis, par la Chine, et sans doute aussi par la France, l'Allemagne, l'Italie et tous les autres pays par rapport auxquels nous ne sommes que quantité négligeable. Mais après tout, n'est-ce pas toujours ainsi que les choses se passent lorsqu'un petit veut jouer dans la cour des grands?
(Le Coin du Ronchon, La Nation du 11 janvier 2002)
Admirable, c'est le mot: pendant que le secrétaire général de l'ONU Kofi Annan reçoit le prix Nobel de la Paix, les Américains, qui se fichent éperdument des mandats de l'ONU, bombardent frénétiquement quelques tertres en Afghanistan, les Israéliens, qui se fichent éperdument des résolutions de l'ONU, pilonnent frénétiquement des villages palestiniens, et les Indiens et les Pakistanais, qui se fichent éperdument de la Charte de l'ONU, menacent de se livrer une guerre nucléaire. Pour compléter ce tableau, Mme Ewa Kedzierska, journaliste invitée dans les colonnes de 24 heures du 31 octobre dernier, nous raconte comment les Chinois, qui eux aussi se fichent éperdument de l'ONU, usent de leur puissance pour y interdire d'accès le Dalaï-Lama: le chef religieux, lui aussi Prix Nobel de la Paix, est soigneusement tenu à l'écart de toutes les réunions religieuses et ses photos ont été méthodiquement bannies du Palais des Nations Unies. Son nom n'existe pas, pas plus que celui du Tibet. Et il n'y a pas de violation des droits de l'homme en Chine...
M. Deiss se réjouit donc que la Suisse rejoigne ce club sympathique où elle pourra «faire entendre sa voix» en se faisant mener par le bout du nez par les Etats-Unis, par la Chine, et sans doute aussi par la France, l'Allemagne, l'Italie et tous les autres pays par rapport auxquels nous ne sommes que quantité négligeable. Mais après tout, n'est-ce pas toujours ainsi que les choses se passent lorsqu'un petit veut jouer dans la cour des grands?
(Le Coin du Ronchon, La Nation du 11 janvier 2002)