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Les migrants sont des crapauds!

La protection des migrants figure au premier rang des préoccupations des pouvoirs publics. Ainsi a-t-on appris récemment que la Ville de Lausanne a fait construire plusieurs nouveaux «crapauducs». Sous ce néologisme extrêmement moche – quoiqu'il fleure bon la noblesse batracienne – se cachent des passages souterrains destinés à sécuriser les «migrations printanières et estivales des crapauds, grenouilles et tritons» qui n'ont pas appris à traverser une route sans avoir préalablement bien regardé à gauche et à droite (alors même que la configuration de ces bestioles devrait leur permettre de regarder des deux côtés en même temps). Et l'on nous annonce fièrement que c'est pour «stopper le massacre des batraciens» que plusieurs de ces nouveaux tunnels ont été aménagés sous la route des Paysans, dans les bois du Jorat. Le communiqué officiel précise en effet que «suite aux températures clémentes de la fin mars, plus de 2500 crapauds, soit les deux tiers de la population de ce secteur, ont emprunté ces voies.» Les nouveaux crapauducs sont-ils équipés d'appareils de comptage?

Le même communiqué nous rappelle que la multiplication des têtards et des grenouilles résulte des mesures volontaires décidées il y a près de vingt ans par la capitale vaudoise pour «favoriser les espèces locales». C'est donc délibérément que nos édiles ont encouragé un tas de nouvelles bêbêtes à traverser la route là où c'était dangereux, découvrant ensuite que ce genre d'intervention en appelait inévitablement d'autres. La construction des crapauducs, réalisée au titre de la «politique de développement durable Agenda 21», coûte aux contribuables (humains) 280'000 francs.

Moralité de l'histoire: lorsqu'il est question de tunnels, il vaut mieux être un crapaud dans le Jorat qu'un automobiliste au Saint-Gothard.

(Le Coin du Ronchon, La Nation du 13 mai 2005)