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Les bons étrangers et les mauvais étrangers

Grand événement: pour la première fois en Suisse, des étrangers ont été élus à un pouvoir législatif! Cela s’est passé tout récemment, dans le Jura, à Delémont, où les habitants qui n’ont pas la nationalité suisse peuvent désormais accéder au conseil de ville. A cette nouvelle, la presse ne s’est plus sentie de joie et a ouvert son large bec pour clamer sa satisfaction. Comme si la seule qualité d’étranger suffisait à prouver qu’on est bon politicien. Comme si l’absence de passeport suisse était la seule chose qui compte pour être bien vu des journalistes.

La seule? Pas si sûr… Quatre ressortissants étrangers ont été élus à Delémont: deux socialistes, un POP et un «chrétien social indépendant». Soit une proportion respectable de cent pour cent en faveur de la gauche. Eh oui, les étrangers de droite ont le sympathique défaut de croire au principe de la nationalité et s’abstiennent donc volontiers de faire de la politique chez nous.

Ce qui explique pourquoi la gauche tient tant à ce qu’on accorde des droits civiques aux étrangers: elle cherche tout simplement du monde! Et les médias s’ébaubissent à condition qu’on leur présente des spécimens qui correspondent à la représentation qu’ils se font des étrangers. Méridional? Gauchiste? Alternatif? C’est bon, vous pouvez passer, bienvenue chez nous!

Mais on rigolera le jour où un Danois blond aux yeux bleus et d’extrême-droite s’avisera d’être élu quelque part en Suisse. Passera-t-il lui aussi à la télévision comme un héros des droits des étrangers?

(Le Coin du Ronchon, La Nation, 15 décembre 2000)