Tous mes articles

Le mensonge n'existe pas

On peut penser ce qu'on veut de M. François Hollande, mais on doit tout de même lui reconnaître une qualité: lorsqu'il s'est trouvé pris récemment dans une affaire embarrassante, il a avoué piteusement, sans chercher à nier des faits qu'il savait largement connus et facilement démontrables. Ce n'est peut-être pas très flamb(o)yant, mais cette sincérité désarmante apparaît finalement moins ridicule que les tentatives de dissimulation maladroites et les dénégations théâtrales pratiquées par ses ministres, lesquels n'en finissent plus de se faire «pincer» à tour de rôle pour des mensonges gros comme des maisons et auxquels personne ne peut croire une seule seconde.

On se souvient de M. Jérôme Cahuzac, ministre du budget et grand pourfendeur de la fraude fiscale, qui avait juré solennellement qu'il n'avait pas de compte bancaire en Suisse. On sait comment ça a fini. Ah bon, vous avez des preuves? Ah mince! Alors oui, c'est vrai, j'ai un compte en Suisse. Ça fait un peu désordre.

Après sa démission, M. Cahuzac a été remplacé par M. Bernard Cazeneuve. Il y a quelques semaines, lorsque le quotidien L'Agefi a publié une vraie enquête (événement rarissime dans la presse actuelle) montrant que les autorités françaises avaient clairement manipulé et donc probablement «épuré», avant de la rendre accessible, la liste de clients volée à la banque HSBC, M. Cazeneuve s'est empressé de répliquer que ces affirmations étaient fausses. Dans les jours qui ont suivi, L'Agefi a continué à publier de nouvelles informations étayées indiquant qu'un service secret français avait eu accès à ces données avant tous les autres et que c'était sans doute à ce stade que trois mille noms avaient opportunément «disparu». M. Cazeneuve n'a plus rien dit.

La dernière affaire en date est celle de l'enseignement dans les écoles publiques de la «théorie du genre» (relativisation et subjectivisation de l'identité sexuelle, qui n'aurait rien à voir avec le fait d'être un homme ou une femme). La chose n'est pas nouvelle: cette théorie révolutionnaire a été inscrite dans le programme d'éducation français en 2011, alors que la droite était encore au pouvoir. Face à la protestation de certains députés, la gauche avait alors soutenu le gouvernement et Mme Najat Vallaud-Belkacem, qui deviendra plus tard «ministre des droits des femmes», s'était fendue d'une déclaration vantant les vertus de la théorie du genre.

Mais aujourd'hui, ce sont les familles musulmanes qui commencent à protester contre cet enseignement en refusant d'envoyer leurs enfants à l'école – ce qui aurait vidé certains établissements d'environ 60% de leurs élèves. Réaction du gouvernement: on nie tout en bloc! La théorie du genre n'est pas enseignée à l'école, c'est une fausse rumeur inventée par l'extrême-droite. Le ministre de l'éducation nationale Vincent Peillon déclare que l'éducation nationale «refuse totalement la théorie du genre». Et la désormais ministre Mme Vallaud-Belkacem en rajoute dans les médias: «Il n'y a aucune théorie du genre qui est développée dans les écoles primaires de France.» Sur le site internet personnel de la ministre, on peut même lire explicitement: «La théorie du genre n'existe pas.»

Apparemment, les ministres français n'ont pas encore réalisé – contrairement à leurs homologues nord-coréens, plus futés – que le peuple, si l'on n'y prend pas garde, risque de trouver beaucoup de choses sur internet.

(Le Coin du Ronchon, La Nation du 7 février 2014)