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Plutôt plus de logique que moins de Schengen

L'Union européenne a instauré entre ses Etats membres la libre circulation des personnes et des marchandises. Tous les contrôles aux frontières, qui étaient plus ou moins intenses selon les pays, ont été supprimés. Les vastes installations douanières qui existaient autrefois, y compris celles que l'on traversait, il y a quelques années encore, pour se rendre dans certains pays d'Europe de l'Est, ont été démontées, laissant la place à des terrains vagues sur lesquels les véhicules se faufilent à vitesse réduite au milieu d'un fouillis de vieilles barrières, parfois observés à distance par quelques douaniers en faction à bord de leur véhicule.

La Suisse n'a pas franchi un tel pas. L'adhésion à l'accord de Schengen a entraîné la suppression du contrôle systématique des personnes, qui ne se pratiquait plus que très rarement. Mais le passage des marchandises reste surveillé, raison pour laquelle les postes de douane ont été conservés et sont toujours occupés, dans la mesure du possible, par des douaniers et des garde-frontières qui scrutent les véhicules et leurs conducteurs et procèdent à des contrôles ponctuels plus ou moins poussés. Exactement comme avant.

Quand on vérifie personnellement ce non-changement le lundi soir, avec un contrôle de la carte d'identité et des papiers du véhicule, puis un examen du coffre (rempli d'excellents biscuits mais exceptionnellement sans aucune bouteille), et qu'on retrouve le mardi matin, dans la presse, les litanies habituelles accusant Schengen de compliquer la lutte contre la criminalité transfrontalière et de laisser le champ libre aux gangsters «lyonnais» (rien à voir avec l'école vaudoise…), on se gratte la tête en se disant que la logique est décidément une qualité bien mal partagée.

Il y a beaucoup de choses, et même beaucoup de choses politiquement incorrectes, à dire et surtout à faire pour lutter contre la criminalité. Mais de grâce, qu'on arrête de nous casser les pieds avec Schengen, qui n'est qu'un non-événement dans la dégradation de notre sécurité. Ce n'est pas en tirant systématiquement à côté de la cible que l'on va abattre beaucoup de gibier.

(Le Coin du Ronchon, La Nation du 10 février 2012)