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CO2 contre H1N1

Y a plus de respect! Prenez la grippe A, par exemple. Elle ne respecte ni les statisticiens, qui avaient annoncé deux millions de victimes en Suisse, ni les journalistes, qui comptaient sur elle pour alimenter leurs titres à sensation. Le virus, après avoir semé la panique, sème donc la désolation en refusant de semer la mort. Quelle déception pour une certaine presse qui n'a rien d'autre à se mettre sous la dent qu'un lointain tsunami et un petit incendie devant ses bureaux à Lausanne.

Alors, pour tenter d'entretenir le suspense, on interroge des experts vexés de voir leurs prédictions remises en cause par les faits et qui se donnent une contenance en répétant inlassablement que la pandémie va arriver «un peu plus tard». Ou alors que beaucoup de gens ont été malades «sans s'en rendre compte» – et n'ont donc pas renseigné correctement les statisticiens fédéraux, ce qui, on le sait désormais, est passible d'une amende.

Mais les journalistes sont des gens pleins d'imagination et de ressources. Ceux du Matin (4.10.2009) ont eu l'idée de présenter l'absence même de grippe comme un événement extraordinaire. Dont il importe évidemment de rechercher les causes. La première coupable est peut-être Marie-Thérèse Porchet, qui a enseigné aux téléspectateurs suisses quelques règles élémentaires de propreté et de savoir-vivre. Ou alors s'agit-il simplement de la «chance» et du «hasard»? Mais une démonstration aussi éclatante et scientifique du Sonderfall helvétique risquerait de contrarier certains historiens.

Reste l'explication météorologique: «Il fait trop chaud!» Si donc nos contrées n'ont pas été décimées par la grippe porcine, c'est grâce au réchauffement climatique. Les émissions de CO2 sont bonnes pour la santé: voilà une excellente nouvelle pour la branche automobile!

(Le Coin du Ronchon, La Nation du 9 octobre 2009)