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Les mots pour rire

Ce qu'ils auraient écrit s'ils avaient eu un peu de lettres et d'esprit

Le drapeau révolutionnaire vaudois ne plaît plus aux révolutionnaires de l'an 2000. Non pas que ces derniers se fussent enfin convertis aux règles de la bonne héraldique, mais le slogan actuel leur apparaissait par trop démodé. Emmenée par un jeune radical – voilà au moins un élément de continuité –, l'Assemblée constituante a donc décidé de remplacer les mots «Liberté et Patrie» par «Liberté et Solidarité».

C'est tout? – Ah non! c'est un peu court, jeune homme! On pouvait dire… Oh! Dieu!… Bien des choses en somme. En variant le ton – par exemple, tenez: «Jeunesse et Avenir». Ou: «Humanisme et Progrès». Ou encore: «Tolérance et Sincérité». Et que diriez-vous de «Fermeté face à la montée du nazisme»? Et de «Conscientisation des masses et développement durable»? Pas mal, hein? D'autres auraient sans doute préféré «Travail, Famille, Patrie» ou «Le Travail rend libre». Mais pourquoi ne pas tout mettre en même temps, y rajouter la Déclaration universelle des Droits de l'Homme, transformer notre écusson en encyclopédie des incantations babas et supporter allégrement les railleries des autres Confédérés?

Ceux-ci ne devraient-ils d'ailleurs pas suivre notre lumineux exemple et adapter leurs armoiries aux exigences d'un monde en perpétuelle mutation? Quand donc remplacera-t-on le sinistre faisceau saint-gallois par un totem aztèque? La crosse bâloise par une guitare électrique? L'ours bernois par un panda du WWF? L'aigle genevois par Donald Duck et sa clé par un badge électronique?

Il m'a fallu une trentaine de minutes et pas un sou pour inventer toutes ces âneries. Puissent les constituants vaudois se montrer aussi économes…

(Le Coin du Ronchon, La Nation du 8 septembre 2000)