Tous mes articles

Déplumés par la fusion de leurs plumes

Les journalistes redécouvrent les cantons

Un journaliste, c'est bien connu, doit être pour l'ouverture et le progrès, contre le cantonalisme étroit et les frontières «de grand-papa». Il doit donc être pour la fusion Vaud-Genève qui permettra de développer des synergies, de réaliser des économies d'échelle, de créer une région européenne et de monter dans le train de l'histoire à l'aube du XXIe siècle.

Eh bien justement, il paraît qu'ils ont eu l'occasion de tester leur rêve, de vivre la grande aventure, de respirer l'air du large bien avant celui du petit ventilateur: en 1994 déjà, les sections vaudoise et genevoise de la Fédération suisse des journalistes ont fusionné pour créer le Syndicat lémanique des journalistes (SLJ).

Las. Sept ans plus tard, c'est la gueule de bois. «Les assemblées sont cruellement désertes. Les questionnaires lancés à tous les membres ne reçoivent presque aucune réponse. Les candidats au comité sont introuvables...». Faute de troupes, mais aussi faute de moyens financiers, le SLJ sera dissout à la fin du mois de juin.

Une question terrible hante les plumes fébriles: la supracantonalité du SLJ expliquerait-elle ce manque d'esprit de fraternité? «Il semble que la fusion Vaud-Genève ait créé un syndicat hors-sol qui ne trouve ses racines nulle part», écrit le nouveau et très provisoire président Albert Tille. Et l'ancien président Michel Chevrolet de surenchérir: «Je ne crois plus à la structure suprarégionale, il faut recréer une association vaudoise et genevoise, plus proches des membres.»

La vérité sortirait-elle quelquefois de la bouche des journalistes?

(Le Coin du Ronchon, La Nation du 15 juin 2001)