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Un problème de sphère, de sommet et de volumes

Qui eût cru qu'une sphère pût avoir un sommet? Et pourtant la Terre vient d'en avoir un, à Johannesbourg. Un sommet où l'on a parlé du développement durable, c'est à dire de tout et n'importe quoi, de l'écologie et de l'industrie, de la surproduction et de la faim dans le monde, des inondations et de la sécheresse, le tout en baffrant des petits fours dans des palaces climatisés, à l'abri de la criminalité qui s'est développée en Afrique du Sud depuis la fin du régime blanc.

Un sommet dont on avait certes arrondi un peu les angles, pour ne blesser personne et surtout pour laisser de la place aux milliers de personnes qui s'y sont pressées. Un sommet, donc, où toutes les sommités étaient venues se faire voir. Un sommet où les super-héros du monde entier ont expliqué comment les autres devaient se comporter pour qu'eux-mêmes puissent sauver la planète. Un sommet où l'on a pu s'endormir en écoutant le discours d'un conseiller fédéral suisse et se réveiller en entendant les appels à la prière des ayatollahs de l'Office fédéral de l'environnement. Un sommet où les peuples en sous-développement durable tenaient des stands et jouaient du tam-tam. Où les fonctionnaires tentaient de quémander quelques subventions pour leur pays. Où les Américains étaient venus sans leur chef – trop occupé à préparer de nouveaux bombardements. Un sommet où les contestataires anti-mondialisation organisaient des contre sommets pour dire exactement la même chose que les participants officiels mais en se plaignant d'être ignorés.

C'est finalement le dessinateur Mix&Remix qui a le mieux "croqué" la situation – reprenant sans le savoir une idée que quelques mauvaises langues avaient déjà évoquée autour d'une table: connaissant le nombre de participants, la capacité des avions de lignes et leur consommation de kérosène, et étant admis que personne ne s'est rendu à Johannesbourg à dos de chameau, calculez le rapport entre le volume de pollution inutilement produit et le volume d'argent englouti pour rien.

(Le Coin du Ronchon, La Nation du 6 septembre 2002)