Tous mes articles

Les partis sont-ils capables de discernement?

Genève accordera dorénavant le droit de vote aux personnes handicapées. C’est du moins ainsi que les médias et les politiciens progressistes nous ont présenté la chose à la fin du mois de novembre, histoire de manipuler un peu nos émotions. En réalité, le droit de vote n’a jamais été refusé aux handicapés en tant que tels, mais uniquement aux personnes jugées incapables de discernement. C’est à ces dernières que les (autres) citoyens genevois ont décidé, à une large majorité, d’accorder les droits politiques. Comme on peut le lire sur le site swissinfo.ch, «toute personne, quel que soit son handicap psychique ou mental, pourra ainsi voter ou être élue».

On entend déjà les ricanements du public: qu’est-ce que ça va changer? on croyait que c’était déjà le cas…

On a tort de se moquer. Qu’on soit progressiste ou conservateur, cette décision a le mérite d’être logique: soit on ne donne le droit de vote qu’à ceux qui sont parfaitement capables de discernement – et on a alors une oligarchie, voire une monarchie; soit on est gentil et on permet à tout le monde de donner son avis. Et quand on dit tout le monde, c’est tout le monde. Les partis de gauche, principaux partisans de cette avancée démocratique, insistent pour qu’on n’aille pas imaginer qu’il puisse y avoir des abus. Des captations de suffrages auprès de personnes incapables de discernement? Impossible! Parce que, quand on est de gauche, on fait confiance aux individus.

Une chose tout de même nous étonne. On sait que les partis politiques combattent tout ce qui, selon eux, risque de favoriser leurs adversaires et concurrents. Ils ne soutiennent les idées novatrices que s’ils sont persuadés que celles-ci sont susceptibles d’accroître le nombre de leurs propres électeurs. Certains politiciens sont-ils à ce point convaincus que l’incapacité de discernement est une caractéristique spécifique des citoyens qui votent pour eux?

(Le Coin du Ronchon, La Nation n° 2164, 18 décembre 2020)