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De la nécessité d'agir contre des inégalités choquantes

Le site internet des Chambres fédérales a récemment publié un petit dossier résumant les débats en cours au sujet des allocations familiales en Suisse. Comme on pouvait s'y attendre, et comme c'est le cas dans tous les dossiers de politique fédérale, la situation actuelle y est décrite de manière soigneusement orientée, en mettant l'accent sur les éléments supposés plaider en faveur d'une solution fédérale: «Les allocations familiales sont la plupart du temps du ressort des cantons et il existe au total en Suisse plus de cinquante systèmes d'allocations différents (...). Le droit aux allocations dépend de la situation professionnelle des parents. Une allocation n'est donc pas versée dans tous les cas, le système n'octroyant souvent pas d'allocations lorsque les parents n'exercent pas d'activité lucrative ou sont indépendants. (...)» Quant au financement quasi exclusif par les seuls employeurs ou à la diversité du coût de la vie selon les régions, ce ne sont évidemment pas des informations pertinentes pour connaître de cette question. Les édiles fédéraux doivent seulement conclure qu'il est urgent d'intervenir afin d'éliminer des lacunes choquantes et de fixer des règles uniformes.

Peut-être faudrait-il alors leur signaler qu'il subsiste encore beaucoup d'autres situations intolérables en Suisse. Notamment parce qu'on y trouve plus de sept millions d'individus ayant chacun une taille différente, un poids différent, un aspect différent, un âge différent, une profession différente, des goûts différents. Cette diversité toute folklorique implique une multiplication peu rationnelle des biens de consommation et entraîne des coûts administratifs élevés pour la maintenance des registres officiels. En outre, cette survivance de particularismes hérités du passé maintient des inégalités choquantes. A l'aube du XXIe siècle, notre société ne devrait en effet plus tolérer que des gens soient petits, gros, moches, bêtes, pauvres, malades et au chômage.

La «nécessité d'agir» étant reconnue, il reste à nommer une commission chargée d'inventer une base constitutionnelle, puis d'élaborer une loi fédérale qui permettra de réduire ces disparités en fixant quelques dispositions morphologiques et psychologiques minimales et en instituant une taxe incitative (redistribuée) frappant les individus qui ne respecteront pas ces normes.

(Le Coin du Ronchon, La Nation du 6 août 2004)