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Des personnages nés d’une feuille de papier

Pliez, découpez, c’est gagné! Voilà la recette toute simple – en apparence – de la passion qui anime Pierre Mauch, architecte à la division des travaux de Lausanne. Durant ses loisirs, lorsqu’il reste chez lui pendant les jours de pluie ou d’hiver, cet Argovien établi à Morges plie des feuilles de papier de couleur, puis les découpe pour y faire apparaître, une fois dépliées, mille et un motifs, personnages, animaux ou plantes. Ensuite, il colle les formes découpées sur une feuille blanche pour obtenir un petit tableau. Et il gagne! Membre du Groupement des cheminots peintres, sculpteurs et écrivains suisses, il a participé l’année dernière à un concours international en Allemagne, et les deux tableaux qu’il présentait y ont reçu le premier prix de leur catégorie: on y voit deux concierges qui bavardent devant leurs corbeilles.

Des ciseaux pour seul outil

Pierre Mauch ouvre un classeur, d’où jaillit aussitôt une ribambelle de petits personnages et animaux, tantôt face à face, tantôt dos à dos. «Ils sont toujours symétriques. Car je plie d’abord le papier, puis je le découpe aux ciseaux. Dans tout ce que je fais, je n’utilise que cet instrument.» Et ses coups de ciseaux n’ont rien à envier à ceux d’un «cutter»: les doigts, les mèches de cheveux, les lacets des souliers même apparaissent avec une précision remarquable. A côté des personnages et des animaux, on trouve aussi des décorations non représentatives, des motifs finement ciselés qui se répètent au gré des pliages successifs. Tout cela tient le plus souvent sur un format de carte postale. «C’est une tradition du Pays d’Enhaut, tant du côté vaudois que bernois. Mais on trouve aussi cette technique dans d’autres pays, au Danemark, en Pologne et même en Chine. Ce que je fais n’est pas vraiment "folklorique"; je représente surtout des scènes de la vie courante, des personnages que j’ai aperçus sur un quai de gare par exemple. Ensuite, je laisse courir mon imagination; je ne fais pas toujours d’esquisses préalables au crayon, cela me permet de découper selon mon inspiration.»

Personnages à plusieurs facettes

Loisirs et travail sont pour Pierre Mauch deux facettes d’une même passion pour le dessin et pour les formes. Le découpage en est l’aspect imaginatif et amusant, tandis que son travail représente le côté technique: depuis 1981, son poste d’architecte à la section des bâtiments l’amène à s’occuper surtout d’aménagements intérieurs, particulièrement pour des buffets ou des restaurants du personnel. Il travaille actuellement à la rénovation de la gare de Thoune. Le découpage, il l’a appris à l’école enfantine; c’était un amusement comme un autre. Aujourd’hui marié et père de deux filles, il découpe avec plus d’enthousiasme que jamais. Il faut savoir qu’une heure suffit déjà pour réaliser un découpage assez simple: c’est dire si ses créations se multiplient et s’accumulent. Heureusement, toutes ne finissent pas au fond d’un classeur. Outre le concours qui lui a valu sa médaille, Pierre Mauch a participé à d’autres expositions en Suisse – à Bulle et à Winterthour notamment – en compagnie d’autres artistes du découpage.

Bonne renommée

Plus sympathique encore, il découpe pour ses amis: «J’ai ici la copie d’un tableau que j’ai offert à mes voisins. J’y ai représenté toute leur famille, le papa, la maman, et les enfants; et comme ils sont norvégiens, je me suis amusé à leur faire des têtes de trolles, ces personnages de la mythologie nordique.» Pierre Mauch découpe aussi pour de grandes occasions: lors de mariages ou de baptêmes, il réalise des cartes qui sont ensuite imprimées. Le bouche-à-oreille fonctionne, et ses amis et les amis de ses amis viennent lui en redemander. Une entreprise de Suisse alémanique lui a même récemment commandé des motifs de décoration pour des cravates.

Pierre Mauch fait aussi un peu de xylogravure, de peinture sur tissus et de photo. Mais c’est certainement le découpage qui lui tient le plus à cœur. Matière première et outils sont les plus simples qui soient: tout l’art réside dans l’imagination et l’habileté!

(Courrier CFF n° 3/1995 – 7 mars 1995)

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