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IFD: la Confédération néglige le quotient familial

Pour rétablir l’équité fiscale entre couples mariés et concubins, le Conseil fédéral a élaboré un nouveau projet basé sur un double calcul et sur des déductions supplémentaires. Pourquoi persiste-t-il à ignorer la solution du quotient familial, simple, efficace et déjà pratiquée depuis longtemps dans le canton de Vaud?

On le déplore depuis de nombreuses années: face à l’impôt fédéral direct (IFD), les couples mariés sont généralement imposés plus lourdement que les concubins. Cette inégalité de traitement est contraire à la Constitution fédérale, mais le monde politique peine – et traîne – à trouver une solution satisfaisante.

Satisfaisant n’est d’ailleurs pas le mot qui convient le mieux pour qualifier le projet publié par le Conseil fédéral le 21 mars dernier. Selon ce projet, après avoir calculé l’impôt des couples mariés selon les règles actuelles de taxation commune, un calcul «alternatif» serait réalisé sur la base d’une taxation individuelle des deux époux. Seul le montant le plus bas des deux calculs serait retenu par l’autorité fiscale. Résumée ainsi, la solution peut paraître d’une complexité maîtrisable – à défaut d’être fondée sur des principes fiscaux très réguliers. Mais les auteurs ont dû y ajouter, pour éviter de nouveaux déséquilibres, des déductions supplémentaires pour les couples à un seul revenu et pour les familles monoparentales. En allongeant ainsi la liste des déductions réservées à des situations particulières, on s’éloignerait une fois de plus du sain principe selon lequel il faut imposer modérément une assiette fiscale la plus complète possible.

Un tel bricolage est-il inévitable pour rendre équitable l’imposition des couples mariés? Le Centre Patronal n’a eu de cesse de rappeler, au cours de ces dernières années, qu’il existe un système simple et parfaitement praticable – parce que déjà pratiqué de longue date dans le canton de Vaud – permettant de respecter l’égalité entre couples mariés et concubins, mais aussi mais entre couples mariés avec ou sans enfants, tout en restant neutre du point de vue de la répartition des revenus, donc en ne privilégiant pas une organisation familiale plutôt qu’une autre. Ce système qui répond à toutes les préoccupations du Conseil fédéral est celui du quotient familial. Il repose sur l’idée que la capacité contributive d’une famille ne dépend pas seulement de son revenu, mais aussi de sa taille et de sa composition. Concrètement, on impose le revenu total du ménage, mais on détermine le taux d’imposition en fonction du «quotient familial», obtenu en divisant le revenu par un coefficient calculé en fonction de la composition du ménage (dans le canton de Vaud: 1,8 pour un couple sans enfants, 2,8 pour un couple avec deux enfants). En d’autres termes, le revenu de la famille est imposé à un taux inférieur que celui qui serait normalement appliqué à un contribuable individuel.

A défaut d’abolir rapidement l’IFD, ou tout au moins de corriger sa vertigineuse progressivité, les parlementaires devraient avoir le courage d’envisager une application du quotient familial – à moins bien sûr d’éprouver un goût immodéré pour les solutions inutilement compliquées.

Pierre-Gabriel Bieri, L'Agefi, 5 avril 2018

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