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Mourir de rire, c’est bon pour la santé

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Autrefois, il était de bon ton de brûler les sorcières (et les sorciers aussi, sans doute, ce qui prouve que l’égalité des sexes n’est pas un concept entièrement nouveau).

De nos jours, croire à l’immortalité de l’âme est devenu extrêmement suspect et le principe de non-discrimination a fait un grand bond en avant: on préfère brûler tout le monde ou presque – en ayant la délicatesse, il est vrai, d’attendre que la personne soit décédée. Il ne reste bientôt plus que quelques fieffés intégristes pour se faire inhumer selon la tradition chrétienne.

Cette nouvelle mode – rationnelle dans un pays surpeuplé mais dommageable en termes d’émissions de CO2 – amène parfois à des rencontres ambiguës. Ainsi, un de nos lecteurs à Epalinges nous signale avec une pointe de perplexité la proximité de l’église des Croisettes, où l’on est censé rendre hommage aux défunts, et de la déchetterie du Giziaux, où l’on est prié d’éliminer les «encombrants incinérables» (sic). La plaquette d’information communale relative à la déchetterie est illustrée par une photographie… de l’église. D’où un risque évident de confusion, surtout lorsque le cher disparu était encore considéré, de son vivant, comme véritablement encombrant.

Faut-il y déceler une volonté délibérée de synergie? La commune rassemblerait ainsi en un même endroit tous les feux infernaux – ceux-là même qui, selon notre avisé lecteur, font froid dans le dos. Quoi qu’il en soit, mieux vaut rire de cette glaçante coïncidence. Car le rire, nonobstant les effrayantes statistiques qui dénombrent nos concitoyens morts de rire, est encore considéré par les plus hautes instances officielles comme «bon pour la santé».

(Le Coin du Ronchon, La Nation n° 2083, 10 novembre 2017)