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Le lac, centre ou limite?

Un de ces derniers samedis, mon frère m’a entraîné manu militari à Romanshorn. Objet du voyage: «Wasser und Feuer 94’», rencontre des pompiers de toute la région de Constance. Sur place, sous le soleil, au bord de ce lac qui rappelle un peu le Léman, le spectacle était réellement impressionnant: pas loin d’une centaine de véhicules venus de Suisse, d’Allemagne et d’Autriche, tous dans un même état propre et impeccable. Partout des pompiers en divers uniformes, riant, discutant, prêts à expliquer au public nombreux le fonctionnement de tel ou tel appareil.

En les écoutant, en assistant à des démonstrations combinées, en regardant passer les grands bacs qui relient chaque heure Romanshorn à Friedrichshafen en transportant voitures et camions, on se rend compte que le lac de Constance est un point de ralliement, un centre géographique plutôt qu’une frontière.

Contraste frappant avec le Léman: on imagine mal une pareille manifestation chez nous. Si la Thurgovie, Saint-Gall, le Vorarlberg et le Bade-Wurtemberg affichent un dynamisme relativement équivalent, la rive sud du Léman a par contre de la peine à rivaliser avec le côté suisse. Activités économiques attirées par Genève, développement urbain peu attrayant, une petite ligne de chemin de fer qui ne dépasse plus Evian: malgré toute leur bonne volonté, nos voisins «d’en face» font figure de parents pauvres. Un bac pour traverser le lac? Pour aller où?

Si cette région appartenait, non à des Français à x kilomètres de Paris, mais à des Savoyards regroupés autour de Thonon par exemple, alors peut-être… le contraste serait moins grand entre des régions qu’un peu d’eau sépare. C’est dire si les principes fédéralistes et une large autonomie régionale font plus pour abattre les frontières que la centralisation à Bruxelles.

(La Nation n° 1473, 4 juin 1994)

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