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On peut tout faire accepter

C’est simple: il suffit d’expliquer

La société se divise en deux groupes: ceux qui savent et ceux qui ne savent pas. Ceux qui savent sont pour les projets novateurs, ceux qui ne savent pas sont contre. Ils sont contre parce qu’ils ne savent pas. Pour qu’ils soient pour, il suffit de leur expliquer. Ceux qui savent doivent donc expliquer à ceux qui ne savent pas pourquoi il faut être pour et pas contre.

Des fois, ça ne marche pas du premier coup. Non seulement ils ne savent pas, mais ils ne comprennent pas ce qu’on leur explique. Il faut alors recommencer, expliquer encore, patiemment. Ceux qui savent doivent être pédagogues. Modernes, s’entend. Ce qui compte n’est pas tant de faire comprendre que de faire passer l’examen. De même qu’on veut obtenir un certain pourcentage de bacheliers, on veut aussi atteindre une certaine proportion de gens qui savent, donc qui soient pour les projets novateurs.

Ainsi l’Europe unie, la monnaie unique, le marché mondial, l’ONU, la citoyenneté mondiale, l’abolition des frontières et de la peine de mort, l’égalité hommes-femmes, l’avortement, le partage du travail, les assurances-maladie, la TVA, les mutations de l’école, de l’Eglise et de la Constitution, tous ces progrès en butte à l’ignorance et à l’incompréhension du peuple, ont vu ou verront le jour grâce aux explications et aux informations dispensées par les esprits éclairés, chargés par le destin de montrer le chemin à l’Humanité. Si les Suisses n’ont pas encore voulu de l’Europe, c’est parce qu’on ne les a pas assez informés; si les Autrichiens en sont déçus, c’est parce qu’on a cessé de les informer après le vote…

Ne faudrait-il pas lancer une campagne d’information auprès des Vaudois qui ne lisent pas La Nation?

(Le Coin du Ronchon, La Nation, 12 avril 1996)