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L’Armée verte

Où l’on apprend que les pacifistes menacent gravement la nature

«Nous prenons au sérieux les exigences de la protection de l’environnement et nous le prouvons […]. Il peut arriver que les résultats des études effectuées ne parlent pas uniquement en notre faveur; nous devons alors nous résigner à opter pour un projet qui respecte mieux encore l’environnement et à faire face à un surcroît de dépenses, tant sur le plan financier pur que sur celui du personnel et du matériel.» L’auteur de cette belle résignation est le chef du domaine des constructions militaires.

Autrefois, on aménageait des ouvrages fortifiés dans le granite et le secret. Désormais, on construit dans la verdure et la bonne conscience écologique. On lit que tout nouveau bâtiment est conçu dans l’optique de sa démolition future! Les hommes en gris-vert veulent devenir des petits hommes verts, et le département de M. Ogi pourra s’appeler «défense et protection des plantes sauvages». On avait connu l’Armée rouge, voici l’Armée verte. Mettre une fleur à son canon ne suffit plus, il faut des conceptions globales de verdure, établies par des «bureaux d’écologie». Les responsables des constructions se déclarent ravis de dialoguer ainsi avec des spécialistes de l’environnement; mieux: certains sont convaincus que les opposants apprennent à mieux comprendre les besoins militaires. C’est sûr: face aux Etats-Unis, l’armée suisse gagnera la guerre écologique.

Les pacifistes se rendent-ils compte qu’ils menacent gravement la nature en voulant couper dans les dépenses militaires?

(Le Coin du Ronchon, La Nation, 8 octobre 1999)