Xénophobie chiffrée est à moitié pardonnée
Le Département de sociologie de l'Université de Genève a réalisé récemment une enquête sur «la misanthropie et l'extrémisme de droite» (ce qui laisse supposer que les auteurs de cette étude associent l'extrémisme de gauche à la philanthropie!), enquête dont la principale conclusion est que plus de la moitié des Suisses ont des préjugés anti-étrangers. On aurait pu s'attendre à ce que la publication de ces résultats déclenche l'un de ces psychodrames sont la presse est friande, surtout durant les mois d'été. Il n'en a pourtant rien été.
En réalité, l'officialité est très contente. Dans un dossier publié le 26 juin dernier sur le site Swissinfo.org, le chef du Service de lutte contre le racisme au Département fédéral de l'Intérieur, Michele Galizia, exprimait déjà sa satisfaction: «Nous n'avions aucune donnée sur l'extrémisme de droite. Nous devions donc nous rabattre sur les sondages des médias. Nous allons enfin pouvoir faire bonne figure face à nos collègues européens et même au Conseil des droits de l'homme de l'ONU!»
On comprend donc que les résultats importent finalement moins que l'existence même de cette statistique qui permet «enfin» à la Suisse de se comparer à l'Europe et aux statisticiens helvétiques de briller dans les cocktails internationaux. Même avec plus de 50% de citoyens «xénophobes» ou considérés comme tels, nous pouvons faire «bonne figure face au Conseil des droits de l'homme» du moment que nous fournissons notre lot de chiffres au grand recueil des statistiques mondiales.
Et comme il se doit, le principal souci des chercheurs est désormais de rendre leur recherche durable. Le chef de service susmentionné n'en fait pas mystère: il va falloir «analyser cette étude et voir comment en faire un véritable monitoring qui nous permette d'établir des points de comparaison dans le temps»; ensuite, «il faudra trouver le moyen de répartir le coût de ce monitoring systématique et régulier entre les différents offices fédéraux».
Gageons que, d'une manière ou d'une autre, le moyen sera trouvé dans notre poche. Au fait, sait-on combien de contribuables suisses ont des préjugés contre les statisticiens?
(Le Coin du Ronchon, La Nation, 4 août 2006)
En réalité, l'officialité est très contente. Dans un dossier publié le 26 juin dernier sur le site Swissinfo.org, le chef du Service de lutte contre le racisme au Département fédéral de l'Intérieur, Michele Galizia, exprimait déjà sa satisfaction: «Nous n'avions aucune donnée sur l'extrémisme de droite. Nous devions donc nous rabattre sur les sondages des médias. Nous allons enfin pouvoir faire bonne figure face à nos collègues européens et même au Conseil des droits de l'homme de l'ONU!»
On comprend donc que les résultats importent finalement moins que l'existence même de cette statistique qui permet «enfin» à la Suisse de se comparer à l'Europe et aux statisticiens helvétiques de briller dans les cocktails internationaux. Même avec plus de 50% de citoyens «xénophobes» ou considérés comme tels, nous pouvons faire «bonne figure face au Conseil des droits de l'homme» du moment que nous fournissons notre lot de chiffres au grand recueil des statistiques mondiales.
Et comme il se doit, le principal souci des chercheurs est désormais de rendre leur recherche durable. Le chef de service susmentionné n'en fait pas mystère: il va falloir «analyser cette étude et voir comment en faire un véritable monitoring qui nous permette d'établir des points de comparaison dans le temps»; ensuite, «il faudra trouver le moyen de répartir le coût de ce monitoring systématique et régulier entre les différents offices fédéraux».
Gageons que, d'une manière ou d'une autre, le moyen sera trouvé dans notre poche. Au fait, sait-on combien de contribuables suisses ont des préjugés contre les statisticiens?
(Le Coin du Ronchon, La Nation, 4 août 2006)