Tous mes articles

Pantoufles im Bundeshuus

Il y a quelques années, l'engagement un peu trop rapide d'un ancien conseiller fédéral écolo-socialiste dans le conseil d'administration d'une grande entreprise de bétonnage avait fait réagir les parlementaires fédéraux. Ces derniers n'ayant pas envisagé que les bonnes manières puissent être définies autrement que par une loi fédérale, ils avaient aussitôt mis en marche la machine législative.

Si le sujet mérite ici quelque mention, c'est parce que le titre rébarbatif de l'initiative parlementaire 10.511 «Karenzfrist bei Mandaten und Funktionen für ehemalige Bundesräte» a été pour une fois joliment traduit en français: «Anciens conseillers fédéraux: pas de pantouflage avant un certain délai».

On se réjouissait déjà d'imaginer que la législation helvétique puisse ainsi s'enrichir d'une loi sur les pantoufles (abrégée LPantoufl dans le recueil systématique). On risque cependant d'être déçu. D'une part parce que le projet officiel a abandonné cette expression aussi plaisante qu'exacte au profit d'une moins poétique «loi fédérale sur le délai de carence applicable aux conseillers fédéraux sortants et aux cadres du plus haut niveau hiérarchique de la Confédération qui ont quitté leurs fonctions». D'autre part parce que toutes les personnes soupçonnées de pantoufler, qu'il s'agisse des hauts fonctionnaires ou des conseillers fédéraux eux-mêmes, ont rendu un avis clairement négatif quant à une législation qui leur interdirait de pantoufler.

Exit les pantoufles, donc. De toute manière, le problème n'a pas été abordé de la bonne manière: la seule question utile est de savoir si un conseiller fédéral est bon ou mauvais. S'il est bon – il semble que ce soit arrivé dans le passé –, il respectera de lui-même les bons usages. Si en revanche il est mauvais, alors l'entreprise qui commettra l'erreur de l'engager sera déjà bien assez punie; et surtout, c'est avant, à son entrée en fonction et pendant son mandat, qu'on doit lui interdire de faire et de toucher quoi que ce soit.

(Le Coin du Ronchon, La Nation du 6 septembre 2013)